Interview rĂ©alisĂ© dans le cadre du Fond de soutien TRAVERSĂES coordonnĂ© par le CIPAC, FĂ©dĂ©ration des professionnels de l’art contemporain, la FRAAP – FĂ©dĂ©ration des RĂ©seaux et Associations d’Artistes Plasticiens, le rĂ©seau Diagonal avec le soutien du ministĂšre de la Culture
A travers votre travail, nous traversons des sujets tels que lâHistoire, la culture populaire, la rĂ©alitĂ© virtuelle systĂ©matiquement en lien ou en regard avec la culture chinoise. Partant de la vertu crĂ©atrice de la diversitĂ© des cultures, clairement affirmĂ©e dans Mythe et signification de LĂ©vi-Strauss pour qui les diffĂ©rences sont extrĂȘmement fĂ©condes, vous semblez en effet faire un pas de cĂŽtĂ© et vous mettre Ă distance de votre propre culture. Et pourtant vous parlez Ă la fois de lâunitĂ© du genre humain et des universaux culturels au regard des caractĂ©ristiques de la contemporanĂ©itĂ©.
Quand je suis venu en France en 2013, cela nâa pas Ă©tĂ© difficile de remarquer la diffĂ©rence entre une image de la Chine que vous propose le parti communiste chinois, et celle de la Chine oĂč jâai passĂ© 23 ans. Comme le dit Sylvia Wynter : âLâhumanisme et le colonialisme habitent le mĂȘme univers politico-cognitif dans la mesure oĂč lâEurope a dĂ©couvert son « soi» en mĂȘme temps que ses « autres »â.
Jâai donc commencĂ© Ă mâintĂ©resser Ă la communication interculturelle dans lâHistoire, je souhaitais savoir comment un lointain a Ă©tĂ© inĂ©vitablement imaginĂ© et interprĂ©tĂ© dans des cultures diffĂ©rentes, surtout entre la Chine, oĂč jâai grandi, et la France oĂč je vis depuis 8 ans, pour mieux savoir dâoĂč je viens et oĂč je pourrais aller.
Et en effet, je suis complĂštement dâaccord avec la phrase de LĂ©vi-Strauss, pour moi, il sâagit de dĂ©tourner pour accĂ©der, comme disait François Jullien dans son livre Le dĂ©tour et lâaccĂšs : âImpossible dâĂ©chapper Ă cette condition : il faut un ailleurs pour prendre du recul. GrĂące Ă lui, le regard portĂ© sur la question peut ĂȘtre plus global ; surtout, on peut remontrer dans ce qui lâa conditionnĂ©e, sonder ses partis pris enfouis – lâenvisager dâune façon plus radicale. â
Comment questionnez-vous la mĂ©moire collective et individuelle ? Quels processus de crĂ©ation utilisez-vous Ă cet effet ? La vidĂ©o When the Sea sends forth a Forest primĂ© pour le Prix Ars Electronica 2021, International Competition for CyberArts, Golden Nica, met en contraste des images dâarchives (vidĂ©os de propagande) et un travail de reconstruction 3D.
Comment lâoutil numĂ©rique amĂšne Ă une mise Ă distance de lâHistoire ? et plus largement de lâimage numĂ©rique sur le rĂ©el ?
A mon avis, la mĂ©moire est plus une sorte de processus perpĂ©tuel, quand on se rappelle de quelque chose, on le reconstitue. LâHistoire est aussi racontĂ©e de maniĂšre diffĂ©rente, dans des Ăšres diffĂ©rentes, sous des formes diffĂ©rentes.
Depuis quelques annĂ©es, jâai dĂ©veloppĂ© une pratique de documentaire expĂ©rimental, pour essayer de questionner comment la gĂ©nĂ©ration de notre mĂ©moire contemporaine est liĂ©e Ă notre cognition et Ă nos actions, qui sont en mĂȘme temps conditionnĂ©es par les outils mĂ©diatiques. Souvent, je pars de quelque chose de concret, des histoires de lâHistoire, par exemple, ensuite, je les rĂ©interprĂšte Ă ma maniĂšre en les sortant de leur registre original. Je crois que la vĂ©ritĂ© se rĂ©vĂšle au moment oĂč un monde glisse vers un autre, il sâagit de laisser passer lâacte dâimaginer.
When the Sea Sends Forth a Forest est un court-mĂ©trage documentaire, rĂ©alisĂ© avec des images dâarchives et aussi des images virtuelles capturĂ©es avec un moteur de jeu. Le projet est issu dâune rencontre avec un survivant chinois des Khmers rouges Ă Nice, cette rencontre mâayant permis de dĂ©couvrir la triste histoire dâune communautĂ© chinoise au Cambodge. Câest une histoire presque jamais mentionnĂ©e dans le monde chinois. Durant les annĂ©es 1975 et 1979, sous le rĂ©gime des Khmers rouges, dirigĂ© par le parti communiste du Cambodge, presque 2 millions personnes sont mortes. Parmi eux, on estime Ă 200,000 les victimes dâorigine chinoise. Beaucoup de ces rĂ©fugiĂ©s chinois et leurs descendants sont installĂ©s aujourdâhui en France.
Quand je faisais des recherches visuelles, je suis tombĂ© sur deux types dâimages qui sont dans deux extrĂȘmes diffĂ©rents; dâune part les images de propagande rĂ©alisĂ©es durant le rĂ©gime des Khmers rouges (sachant que les khmers rouges ont tout fait pour que lâinformation ne sorte pas du pays) et dâautre part, les tristes images quâon a pu capturer aprĂšs la chute du parti (ou les images qui montrent une prospĂ©ritĂ© du pays dans les annĂ©es 60 dont beaucoup sont rĂ©alisĂ©es par des français). Cette histoire est donc devenue, pour moi, une sorte de rĂ©alitĂ© virtuelle. La question de lâintention est aussi devenue importante, il faut savoir dans quel contexte et avec quelle intention les images dâarchives sont faites.
Pour pouvoir Ă©voquer le dispositif cinĂ©matographique des archives, jâai créé un univers virtuel et intĂ©ractif dans le moteur de jeu et jâai incrustĂ© les images dâarchives dans ce monde. En projetant les images dâarchives sur des arbres, en dĂ©coupant les images dâarchives et en les incrustant dans des scĂšnes 3D, jâai eu envie de crĂ©er des petits moments de confusion. Je veux dire par lĂ que jâinvite les spectateurs Ă avoir un doute sur ce quâils sont en train de regarder, comme tu dis, de proposer une mise en distance avec lâHistoire.
Le but de ce projet nâest pas dâ Ă©valuer qui a tort ou qui a raison dans lâHistoire, mais de discuter de la maniĂšre de fabriquer des images qui inclinent notre regard vers le rĂ©el, et aussi de permettre de comprendre comment mieux vivre le passĂ© dans le futur.
Depuis le dĂ©but de votre pratique, votre travail est ponctuĂ© de temps introspectifs questionnant le statut de lâartiste. Dans I Ainât No Boring Artist, ramenĂ© Ă lâendroit nĂ©cessaire de sa responsabilitĂ© vis-Ă -vis de la sociĂ©tĂ©, lâartiste est ici non complaisant, non conformiste, il nâest pas dupe, il doit âatteindre la poĂ©tique dans la pratiqueâ. Ne pouvons-nous pas y lire une dĂ©marche pamphlĂ©taire qui montre que vous semblez adhĂ©rer Ă la thĂšse de lâartiste comme hĂ©ros ?
LâĂ©ducation que jâai eu en Chine continentale mâa conduit Ă un certain scepticisme, parce que je ne crois pas Ă ce qui est reprĂ©sentĂ©. Dans I Ainât No Boring Artist, jâai pris les codes dâun clip de musique rap, oĂč les matiĂšres, symboles et significations sont dĂ©calĂ©s : un modĂšle 3D de Picasso, artiste emblĂ©matique de lâart occidental, est animĂ© par l’intelligence artificielle. Il pratique la callisthĂ©nie, un exercice physique quotidien imposĂ© par lâĂ©ducation de ma gĂ©nĂ©ration en Chine. Le rappeur fredonne au lieu de rapper; le texte diffusĂ© est issu dâextraits de manifestes artistiques ou politiques empruntĂ©s dans lâHistoire et va Ă lâinverse de ce que jâobserve aujourdâhui. J’ai l’impression que les jeunes artistes dâaujourdâhui peuvent former une vraie force sociale, ils sont prĂȘts Ă offrir des propositions, mais je ne considĂšre pas pour autant les artistes comme des hĂ©ros. La majoritĂ© des artistes sont fatiguĂ©s de devoir en permanence rĂ©pondre Ă des appels, des concours et Ă des entretiens. Ce nâest pas toujours facile, mais malgrĂ© tout les artistes vont continuer Ă travailler sur ce dĂ©calage, entre le monde tel quâon le voit et le monde tel quâon voudrait quâil soit. Comme disait Hito Steyerl : â Peut-ĂȘtre que ce que lâart peut faire maintenant est ce quâil fait de mieux : regarder, Ă©couter et interprĂ©ter avec prĂ©cision, imaginer sans compromis ni peur.â
Par ailleurs, est-ce que votre pratique artistique critique et politique est susceptible de pouvoir ĂȘtre prĂ©sentĂ©e en chine ?
Concernant la diffusion en Chine, beaucoup des vidĂ©os que j’ai rĂ©alisĂ©es ont du mal Ă ĂȘtre diffusĂ©es en Chine, la censure y Ă©tant devenue de plus en plus grave. A chaque fois les curateurs valident les projets qui nâencourent aucun risque. Mais jâessaie quand mĂȘme de les montrer en utilisant certaines stratĂ©gies, par exemple, en les prĂ©sentant dans des lieux plus petits oĂč il y a peu de communication, etc… Parce que c’est important pour moi de montrer mes projets aux spectateurs chinois.
Jâai Ă©tĂ© trĂšs intriguĂ©e par Very, Very, Tremendously, cette vidĂ©o dâanimation qui utilise des extraits en 3D tirĂ©s du jeu vidĂ©o amĂ©ricain Battlefield 4 (2013). Ce jeu Ă©minemment gĂ©opolitique est un reflet du contexte Ă©conomique actuel entre la Chine et les Etats-Unis. Il sort sur le marchĂ© de maniĂšre concomitante avec la guerre commerciale entre les USA et la Chine et les prises de position mĂ©diatisĂ©es de Donald Trump et Xi Jinping. Battlefield 4 se situe en 2020, oĂč des troubles civils en Chine forment lâarriĂšre-plan du jeu et les militaires amĂ©ricains doivent combattre pour la paix et mettre Ă jour les conspirations chinoises. Ce jeu a Ă©tĂ© tout simplement interdit de diffusion en Chine continentale.
Je comprends votre intĂ©rĂȘt pour la trame scĂ©naristique de ce jeu vidĂ©o et lâhistoire qui sâest construite autour. A nouveau la coexistence de deux cultures est en jeu et ici la rĂ©alitĂ© virtuelle devient un outil potentiel de discrĂ©dit dâune culture, dont lâintention est perçue comme une nouvelle forme dâinvasion culturelle et dâagression possible. Pouvez-vous nous en dire plus sur cette Ćuvre ? Comment avez-vous pensĂ© et construit votre travail autour de cette histoire ? Ce qui nous permet dâaborder avec vous votre façon de percevoir le passage du monde virtuel au monde rĂ©el, sur la question de cette co-substantialitĂ© entre deux types de rĂ©alitĂ© ?
Jâai eu lâidĂ©e de faire cette vidĂ©o lors du deuxiĂšme confinement en France. Jâavais du temps pour me lancer dans une recherche autour de la reprĂ©sentation de la Chine (ou de la culture chinoise) dans les jeux vidĂ©os, je suis donc tombĂ© sur Battlefield 4. En novembre 2020, la plupart des pays europĂ©ens ont dĂ©cidĂ© de confiner Ă nouveau leurs pays. Aux USA, Donald Trump Ă©tait en train de concourir pour l’Ă©lection prĂ©sidentielle, il venait de lancer une sĂ©rie d’actions pour serrer encore la vis Ă la Chine. Jâai la sensation que le virtuel et le rĂ©el se rejoignent Ă ce moment trĂšs spĂ©cifique.
Alors que je jouais Ă ce jeu, jâai Ă©tĂ© attirĂ© par un genre dâobjet 3D particulier, le dĂ©chet. Dans le jeu, les dĂ©chets 3D ne sont pas du tout des reproductions de la rĂ©alitĂ©, mais plutĂŽt des crĂ©ations imaginaires. Les choses sont créées pour ressembler Ă celles dâune autre culture. Je connaissais la phrase de Lacan : â La civilisation [âŠ] câest lâĂ©gout. â Jâai donc commencĂ© Ă rĂ©flĂ©chir sur ces questions : quel est notre rapport au dĂ©chet numĂ©rique ? Quâest-ce que ça signifie de fabriquer des ordures dans le virtuel ?
Very, Very, Tremendously cherche Ă discuter de la façon dont les actes de production et de consommation du monde virtuel interagissent systĂ©matiquement avec la rĂ©alitĂ©, tout en reflĂ©tant la façon dont les âdeux rĂ©alitĂ©sâ coexistent dans les conflits gĂ©opolitiques. Le virtuel, en tant que potentiel rĂ©alisĂ© dans le rĂ©el, est devenu une rĂ©alitĂ© en soi. Notre attention et notre action dans le monde digital conduisent Ă gĂ©nĂ©rer une rĂ©alitĂ© alternative. Dâun cĂŽtĂ©, les streamers de jeu remplissent un volcan avec des dĂ©chets, ensuite les versent sur la ville quâil a construite ; de l’autre cĂŽtĂ©, on trouve de vraies montagnes de dĂ©chets sur lesquelles les gens essayent de gagner quelques euros en fouillant. DerriĂšre le Bitcoin, un systĂšme monĂ©taire dĂ©centralisĂ©, se trouvent des fermes d’exploitation de Bitcoin centralisĂ©es. La cryptomonnaie propose une maniĂšre dĂ©centralisĂ©e aux Ă©changes Ă©conomiques, mais ce sont des capitaux centralisĂ©s qui profitent en premier, par exemple, de construire des fermes d’exploitation de cryptomonnaie immenses, ou de manipuler le marchĂ© pour accumuler la richesse, comme le fait Elon Musk.
Vous crĂ©ez aussi des objets de design et des sculptures; Ă cet effet lâobjet intitulĂ© IYESU est assez Ă©nigmatique. Il sâagit dâun collier de projection personnalisĂ©, avec un viseur optique installĂ© au centre dâune monture dorĂ©e. Quand nous approchons un Ćil, nous pouvons y dĂ©couvrir un Christ en croix. Vous me disiez que vous Ă©tiez intĂ©ressĂ© par les systĂšmes de reprĂ©sentation religieuse. Pouvez-nous tout dâabord nous donner plus de dĂ©tails sur l’Ćuvre IYESU ?
LâidĂ©e du projet vient dâune publicitĂ© autour dâun collier intitulĂ© âJe tâaime en 100 langues diffĂ©rentesâ, qui est un objet de dĂ©claration dâamour trĂšs Ă la mode sur internet en Chine. Câest un collier utilisĂ© pour âregarderâ. Le viseur au centre du collier peut ĂȘtre personnalisĂ© selon les exigences du client. En gĂ©nĂ©ral, les acheteurs choisiront dây graver des photos dâamoureux.
J’ai commandĂ© une sĂ©rie de colliers avec une figure de crucifixion. Jâai utilisĂ© une sĂ©rie dâimages de lâhistoire du Catholicisme en Chine, c’est-Ă -dire des gravures illustrant le martyre des missionnaires europĂ©ens en ExtrĂȘme-Orient. Il existe des illustrations bibliques provenant des livres chinois publiĂ©s sous les dynasties Ming et Qing, des motifs de JĂ©sus en porcelaine commandĂ©s par les europĂ©ens et fabriquĂ©e par des artistes chinois pendant la pĂ©riode des Treize Factories (les seuls endroits autorisĂ©s Ă faire du commerce avec les Ă©trangers) Ă Guangzhou, etc… Le projet est intitulĂ© IYESU, la prononciation chinoise est la mĂȘme que âLove Jesusâ, elle peut Ă©galement ĂȘtre dĂ©montĂ©e en I YES U.
Dans la video AnagÄriya, je vous questionnais sur le sens de lâhistoire de Zhuying et Kangtai, gymnosophistes de lâĂ©poque des Trois royaumes (pĂ©riode se situant aprĂšs la dynastie Han entre 220 et 280). Vous mâexpliquiez que les concepts de « se souvenir de l’avenir » et âd’imaginer le prĂ©sentâ, lus dans les sous-titres, sont trĂšs influencĂ©s par la philosophie bouddhiste . Pourquoi ce phĂ©nomĂšne de dĂ©ploiement dâune religion dans une culture vous fascine-t-il ?
Pourquoi croyons-nous ? Pourquoi choisissons-nous une croyance, mĂȘme si elle ne vient pas de ta langue ? Aujourdâhui, alors que les serments ne fonctionnent plus et que les croyances disparaissent gĂ©nĂ©ralement, je voudrais savoir dans lâhistoire Ă quoi cela ressemble quand les gens sont toujours prĂȘts Ă croire.
La plupart des premiers Ă©changes interculturels Ă©taient liĂ©s Ă la religion. Je suis obsĂ©dĂ© par la figure telle que AnagÄriya.Si on traduit littĂ©ralement, le mot peut ĂȘtre compris comme âles gens qui quittent la famille pour pratiquer la foiâ; cette figure se retrouve dans presque toutes les cultures. Xuanzang a passĂ© 16 ans Ă rĂ©cupĂ©rer des textes bouddhiques depuis lâInde, il a ensuite consacrĂ© le reste de sa vie Ă les traduire. Le jĂ©suite Matteo Ricci a voyagĂ© Ă travers les ocĂ©ans pour venir en Chine et il a beaucoup Ă©tudiĂ© le chinois, afin de mieux leur transmettre sa foi, et il est dĂ©cĂ©dĂ© Ă PĂ©kin. Quand nous vivons les serments uniquement en regardant des Ă©crans et en likant sur les rĂ©seaux sociaux, je ne peux quâimaginer que les gens croient encore Ă leurs histoires.
Pouvez-vous Ă©galement nous en dire plus sur les sculptures AnagÄrikaâs Body Schema ?
Dans certains projets, j’utilise la technique de la photogrammĂ©trie pour rĂ©aliser des modĂšles 3D, il s’agit de prendre des photos sur tous les angles d’un objet rĂ©el, pour que l’algorithme puisse gĂ©nĂ©rer un modĂšle Ă partir de photos. Quand certaines sculptures sont dans une position spĂ©cifique, on ne pourra jamais avoir les photos sur tous les angles,ce qui fait qu’on va avoir des erreurs numĂ©riques dans notre rĂ©sultat.Cette erreur est donc fortement liĂ©e avec notre regard particulier ou incomplet,ce qui est pour moi une mĂ©taphore du malentendu dans la communication interculturelle. Les sculptures prĂ©sentĂ©es ici sont toutes des mains dans des cultures diffĂ©rentes, elles sont dĂ©jĂ des traductions, par exemple, une sculpture bouddhique faite par des artisans français, ou Ă l’inverse, une sculpture catholique que j’ai trouvĂ©e en Chine, fabriquĂ©e par des artistes chinois.
Enfin, vous vous emparez des grandes figures de nos civilisations que vous mettez en regard. JĂ©sus, Nicolas Poussin, Zhuying et Kangtai, Trump et Xi Jinping, Ă©galement Picasso et Zhang Daqian, que lâon retrouve dans lâinstallation Mr. BI. Symboles qui peuvent pourtant ĂȘtre perçus comme dĂ©suets, assimilĂ©s, ou caricaturaux, ou bien des figures emblĂ©matiques de notre imaginaire. En quoi sont-ils pour vous des sources dâinspiration ?
Je fais attention Ă lâĂ©vĂ©nement rĂ©el, Ă la façon dont les gens le dĂ©crivent. Notre rĂ©alitĂ© maintenant est plus Ă©trange que toute forme de fiction quâon pourrait imaginer. Maintenant les informations entourant les Ă©vĂ©nements rĂ©els sont idĂ©ologiques et commerciales;, les reportages actuels doivent donc devenir encore plus fous, sinon ils ne seront pas Ă la hauteur de ce qui sâest passĂ©. La rĂ©alitĂ© en elle-mĂȘme devient de plus en plus Ă©trange, et personne ne semble s’intĂ©resser Ă la vĂ©ritĂ©, Ă la vĂ©racitĂ© des choses. Et tout le monde se prĂ©cipite pour donner sa vision de la chose.
Du coup, de mon cÎté, souvent je travaille avec un événement précis, ou une figure précise, en analysant les narrations autour de cet événement ou de cette personne dans des registres de présentation différents.
Pourquoi l’ĂȘtre humain a-t-il besoin de crĂ©er des grandes figures ? Pourquoi Ă©prouve-t-on ce dĂ©sir de rendre un Ă©vĂ©nement lĂ©gendaire ?
Mes ressources sont donc des histoires, de vraies histoires, on va dire, ou, les maniĂšres que lâon a de les raconter. Je trouve qu’il y a trop d’informations aujourd’hui, alors au lieu de choisir une ressource, je me dis quâil faut peut-ĂȘtre apprendre Ă ne pas choisir.
Novembre 2021,
Constance Juliette Meffre
INFORMATIONS
Very, Very, Tremendously, 2021, 12’10 »
trailer : https://vimeo.com/576386643
I Ainât No Boring Artist, 2021, 03’58 »
When The Sea Sends Forth a Forest, 2020, 21’10 »
trailer : https://vimeo.com/458623626
Antimony Capital News, 2019, 27â23ââ
Trailer: https://vimeo.com/342741369
BIOGRAPHIE :
NĂ© en Chine en 1990 Liu Guangli commence ses Ă©tudes en conception mĂ©canique et automatisation, et bifurque un an plus tard, sâintĂ©ressant aux mĂ©dias numĂ©riques. Ce tournant lâamĂšne en France, oĂč il Ă©tudie Ă la Villa Arson Ă Nice, dont il sort avec les fĂ©licitations du jury, en 2017, et sera diplĂŽmĂ© ensuite du Fresnoy-Studio national des arts contemporains en 2020. PassionnĂ© de technique, il a dĂ©veloppĂ© une pratique autour de la vidĂ©o, de lâanimation 3D et de la peinture. En proposant des univers virtuels, ses Ćuvres tentent de questionner comment sâimbriquent le mĂ©dium numĂ©rique dans la narration contemporaine et la reconstruction de notre mĂ©moire collective.
ACTUALITES
When the Sea Sends Forth a Forest
5. Nov. – 7. Nov. received a honorable mention at Chicago Underground Film Fest
16. Nov. -21. Nov. Kassel Dokfest, nominated for the Golden Key, Kassel, Germany
19. Nov. -29. Nov. Beijing International Short Film Festival, Beijing, China
7. Dec. -12 Dec. Festival Internacional de Videoarte, Buenos Aires, Argentina
IYESU
11. Nov. – 5. Dec. Memento, Zeto Art, Paris, France
Very, Very, Tremendously
11. Nov – 29. Nov. Beijing International Short Film Festival, Beijing, China, world premiere





